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jeudi 30 mars 2023

Dangereux

Allié de circonstance, de par sa position stratégique et sa proximité culturel avec l’Afghanistan, le Pakistan qui a profité pendant des années de financements américains n’est plus très bien vu aujourd’hui à Washington. Et si Donald Trump avait été le premier à oser dénoncer les relations ambiguës des autorités pakistanaises avec les talibans et organisations terroristes de toutes sortes, l’administration Biden semble décidée aussi à ne pas fermer les yeux sur les sulfureuses accointances d’Islamabad avec les fondamentalistes religieux. L’ambassadeur américain au Pakistan a pour cette raison été convoqué samedi au ministère des Affaires étrangères pour s’expliquer sur les propos de Biden, qui a qualifié le Pakistan d’un des pays «les plus dangereux au monde» car il possède l’arme nucléaire. À l’occasion d’une collecte de fonds du Parti démocrate jeudi à Los Angeles, le Président Biden a fait une digression étonnante alors qu’il parlait de la Russie et de la Chine, présentant le Pakistan comme «l’une des nations les plus dangereuses au monde», un pays possédant «des armes nucléaires (mais) sans aucune cohésion». Quelques heures après que la transcription de ce discours a été mise en ligne sur le site internet de la Maison-Blanche, le Pakistan a convoqué l’ambassadeur américain, Donald Blome, pour une «démarche officielle», a indiqué le ministre pakistanais des Affaires étrangères, Bilawal Bhutto Zardari, lors d’une conférence de presse à Karachi. «Je suis surpris par les propos du Président Biden. Je pense que c’est exactement le genre de malentendu qui est créé quand il y a un manque de discussion», a estimé Bilawal Bhutto Zardari. Les relations entre les États-Unis et le Pakistan se sont dégradées depuis le retrait américain d’Afghanistan en août 2021, après deux décennies de guerre. Le Pakistan fournissait un accès logistique crucial à l’armée américaine pendant ce conflit. Mais Washington considère qu’en même temps la toute-puissante armée pakistanaise et ses services secrets ont continué à soutenir les talibans, revenus au pouvoir avec le départ des Américains, 20 ans après en avoir été chassés. «Nous devons leur donner l’opportunité d’expliquer cette position. Je ne pense pas que cela devrait affecter négativement les relations entre le Pakistan et les États-Unis», a cependant ajouté Bilawal Bhutto Zardari, remarquant que Joe Biden ne s’était pas exprimé dans un cadre protocolaire mais lors d’une «conversation non officielle pour une collecte de fonds». Washington est également circonspect sur les relations étroites entretenues par le Pakistan avec la Chine, qui construit dans ce pays un corridor économique d’un coût de 54 milliards de dollars devant donner à Pékin un débouché sur l’océan Indien. Le gouvernement américain a mis en garde à plusieurs reprises le Pakistan contre le risque que Pékin en tire l’essentiel des bénéfices, le laissant avec une dette écrasante. Islamabad a récusé ces avertissements. Le Pakistan, puissance nucléaire depuis 1998, s’est abstenu mercredi lors d’un vote à l’Assemblée générale de l’ONU condamnant les «annexions illégales» de territoires ukrainiens, malgré une forte pression diplomatique de Washington pour isoler encore plus largement Moscou sur la scène internationale. Ainsi, Islamabad qui espérait certainement que les relations avec Washington s’éclaircissent après le départ de Trump de la Maison-Blanche, doit aujourd’hui être dépité de voir que le fossé qui s’est créé depuis 2016 avec son allié américain loin de se combler ne fait au contraire que s’agrandir. Après tout, les Américains, qui ont quitté maintenant l’Afghanistan, n’ont plus besoin de feindre d’ignorer les liens sulfureux des autorités pakistanaises avec des entités terroristes.

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