Demain 9 mai, le défilé du Jour de la Victoire à Moscou sur la place Rouge ne sera sans doute pas suivi, du moins hors de la Fédération de Russie, autant que l’ont été avant-hier les fastes du couronnement de Charles III. Cependant, il y a tout lieu de penser qu’il le sera davantage que d’habitude, non pour lui-même mais en raison de l’attaque de drones contre le Kremlin du 3 mai dernier. De tous les étrangers dans le monde, les Occidentaux impliqués dans la guerre par procuration contre la Russie depuis son invasion de l’Ukraine seront sûrement ceux qui seront les plus nombreux à regarder leur transmission sur les ondes. Non qu’ils leur trouvent un quelconque intérêt, mais parce que mis en appétit par l’attaque sur le Kremlin, à laquelle ils font semblant de ne pas croire, ils voudraient être devant leurs écrans pour le cas où une attaque du même genre, ou quelque autre attentat, se produisait en direct. La probabilité est forte que la violation du Kremlin, qui soit dit en passant n’est pas sans rappeler l’invasion du Capitole américain en janvier 2020, avait pour objectif de faire annuler la célébration de la victoire sur le nazisme.
Les Ukrainiens se féliciteraient, quand bien même ils ne seraient effectivement pour rien dans l’attaque en question, comme d’une victoire remportée par eux sur le front si les Russes, ne voulant pas tenter le diable, décidaient d’annuler le défilé du 9 mai. Mais on sait que les célébrations sont maintenues, bien que revues à la baisse, à ce qu’il semble en tout cas, à cause de la guerre non par crainte d’un attentat. Il faut dire que les Ukrainiens ont plus que jamais besoin de réaliser des coups spectaculaires. S’ils ont nié que ce soit eux les auteurs de l’attaque contre le Kremlin, ils se sont par contre hâtés de faire savoir qu’ils ont réussi à intercepter grâce au système anti-missile Patriot américain un missile hypersonique russe. Les Américains n’ont toutefois pas encore confirmé le fait. Il n’en reste pas moins que cet empressement à le claironner est un message limpide à l’usage des Américains et des autres alliés fournisseurs d’armes : voyez ce que nous savons tirer des armes que vous nous livrez, des choses dont peut-être vous-mêmes serez incapables. On a dit et répété que les systèmes anti-missile quels qu’ils soient ne peuvent pas arrêter des missiles hypersoniques. C’était compter sans les Ukrainiens, qui, à peine ont-ils appris à manier les Patriot qu’ils leur font faire un prodige. La réalité c’est que les Ukrainiens ont peur, de l’aveu de Volodymyr Zelensky lui-même, s’ouvrant au Washington Post, que leur contre-offensive ne soit pas à la hauteur des attentes des alliés, qui par suite en viennent à réduire leur aide. Si la première contre-offensive des Ukrainiens, celle lancée l’automne dernier, n’avait rien donné, les Occidentaux ne les auraient pas réarmés. Ils ne se tiennent à leur côté que dans l’espoir qu’ils l’emportent sur les Russes, qu’ils leur fassent subir cette fameuse défaite stratégique promise par les Américains. Mais si jamais ils acquièrent la certitude qu’ils en sont incapables, qu’ils désespèrent d’eux, ils mettront fin à leur aide, ils arrêteront les frais. Ils les abandonneront aux Russes en d’autres termes. Cela fait déjà un certain temps que les Occidentaux, les Américains tout les premiers, leur disent qu’ils peuvent y aller maintenant, qu’ils leur ont donné les moyens nécessaires pour cela, et qu’eux-mêmes tergiversent, et s’accrochent à Bakhmout, que pourtant ils sont en train de perdre, à supposer que ce ne soit déjà fait.