Depuis des décennies, lors des élections en France, qu’elles soient présidentielles, régionales ou même municipales, les électeurs sont habitués à recevoir lors des deuxièmes tours, des consignes de votes de la part de leurs partis. Surtout lorsque le Front National, devenu le Rassemblement National en 2018, est encore dans la course. Or, aujourd’hui les électeurs sont de moins en moins sensibles au principe du « front républicain » et acceptent d’autant moins de voir des personnalités politiques tenter de leur imposer une ligne de conduite électorale. Aujourd’hui, à quelques jours du tour de l’élection présidentielle, malgré la forte probabilité d’un nouveau second tour opposant Emmanuel Macron à Marine Le Pen, la candidate de droite Valérie Pécresse jette un pavé dans la marre en affirmant refuser de donner des consignes de vote. « Je dirai pour qui je vote, mais pas de consigne », a répondu la candidate LR à la question d’un auditeur lors d’un passage à la radio. « Je ne donnerai jamais de consigne aux français parce que les français sont libres et c’est eux qui votent », a-t-elle ajouté, interrogée à Lyon, où elle a tenu jeudi soir son dernier meeting. « Je souhaite que les français me placent au deuxième tour. Qu’ils ne soient dupes d’aucun faussaire de la droite. Si tel n’était pas le cas, comme je l’ai toujours fait, je dirai clairement quel sera mon vote et je dirai le chemin que je pense le bon pour la France », a ensuite tweeté Valérie Pécresse. « Je pense que c’est une décision sage », a réagi sur France Info Marine Le Pen, donnée par les sondages au second tour avec le président sortant. Pour la candidate du Rassemblement National, « c’est un changement de jurisprudence chez LR » qui démontre que le parti, « probablement extrêmement divisé », « n’a pas du tout envie d’être emmené comme un troupeau de moutons vers Emmanuel Macron, comme ça a été le cas en 2017 ». Réponse négative également de Valérie Pécresse à la question de savoir si elle accepterait un poste au gouvernement en cas de réélection d’Emmanuel Macron : « Non, je ne souhaite pas avoir de responsabilité avec un président de la République qui fait une politique que je réprouve, qui n’est pas la mienne. » À deux jours du premier tour de l’élection présidentielle, Valérie Pécresse, donnée quatrième ou cinquième dans les sondages, a de nouveau estimé que « le scénario était écrit d’avance ». Le président sortant « voulait un face-à-face avec les extrêmes parce que le face-à-face avec les extrêmes, c’est l’assurance réélection d’Emmanuel Macron », a-t-elle affirmé. « Le président a volontairement escamoté » la campagne, a-t-elle accusé, « et c’est pour ça qu’il y a aujourd’hui une vague de dégagisme très puissante dans le pays et une vague de colère », a-t-elle insisté, critiquant son bilan « calamiteux ». Mais le changement de position de Pécresse a de quoi étonner lorsque l’on sait que lorsqu’elle avait quitté Les Républicains en 2019 elle avait évoqué parmi les raisons la poussant à quitter sa famille politique le refus de Laurent Wauquiez, président de LR en 2019, à donner des consignes de vote pour faire barrage à Marine Le Pen. La question d’un « front républicain » face à Marine Le Pen est au cœur de la dernière journée de campagne. À gauche, Jean-Luc Mélenchon a indiqué qu’il consulterait les 310 000 personnes qui l’ont soutenu en ligne avant de donner une consigne, ce qui lui vaut les critiques de ses concurrents, qui y voient une ambiguïté face à l’extrême droite, même si LFI assure que voter pour Le Pen au second tour « n’est pas une option ». Le candidat communiste Fabien Roussel a indiqué qu’il appellerait à « empêcher l’extrême droite de mettre la main » sur la France et la candidate socialiste Anne Hidalgo, qu’elle appellerait « de toute façon à faire barrage à l’extrême droite ». Reste à voir toutefois si ces positions resteront les mêmes au soir du premier tour du scrutin et durant les deux semaines de l’entre-deux tour ou si des tractations de dernière minute auront raisons de la fermeté affichée des candidats à la présidentielle.