Si les relations entre Cuba et les États-Unis ont semblé sous le second mandat de Barack Obama sur le point de connaître une amélioration historique, la situation s’était beaucoup dégradée sous la présidence de Donald Trump qui avait même replacé l’Île sur la liste des États parrains du terrorisme. Et sous la présidence de Joe Biden les choses ne semblent pas aller beaucoup mieux entre les deux pays voisins. En effet, le Président cubain Miguel Diaz-Canel a rendu responsable, lundi, le gouvernement américain des manifestations historiques survenues la veille, via sa «politique d’asphyxie économique», tandis que Washington et l’Union européenne appellent au calme. A la télévision, le dirigeant communiste a assuré que son gouvernement essaie d’«affronter et de vaincre les difficultés face aux sanctions américaines», renforcées sous d’administration Trump (2017-2021). «Que cherchent-ils ? Provoquer des troubles sociaux, mais aussi le fameux changement de régime», a-t-il dénoncé. Des accusations qualifiées de «grave erreur» par le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, ce qu’a contesté le chef de la diplomatie cubaine Bruno Rodriguez, fustigeant «le renforcement de la politique de siège économique en pleine pandémie». Le Président Biden a, lui, appelé «le régime cubain à entendre son peuple et son appel vibrant à la liberté», en se gardant de toute «violence» contre les manifestants. Même ton du côté de l’Union esuropéenne, dont le chef de la diplomatie, Josep Borrell, a demandé «aux autorités d’autoriser ces manifestations et d’écouter le mécontentement des manifestants». Les rues de La Havane étaient quant à elles sillonnées par la police et l’armée, mais le calme était revenu après les échauffourées de la veille. Plusieurs dizaines de personnes, dont des journalistes indépendants cubains, ont été arrêtées et leurs proches se pressaient lundi aux abords des postes de police pour avoir des nouvelles. En fin de journée, une manifestation d’une centaine de personnes a éclaté dans un quartier de La Havane, la Güinera, aux cris de «A bas le communisme» et «Patrie et vie» (du nom d’une chanson polémique), avant des heurts avec les forces de l’ordre qui ont arrêté au moins cinq personnes. Excédés par la crise économique qui a aggravé les pénuries d’aliments et de médicaments et poussé le gouvernement à couper l’électricité plusieurs heures par jour, des milliers de Cubains étaient sortis spontanément dimanche dans les rues de dizaines de villes et villages, aux cris de «Nous avons faim», «Liberté» et «A bas la dictature». Une mobilisation inédite à Cuba, où les seuls rassemblements autorisés sont généralement ceux du Parti communiste (PCC, unique). Grand soutien des autorités cubaines depuis l’époque soviétique, la Russie a quant à elle mis en garde contre toute «ingérence étrangère (…) qui favoriserait la déstabilisation de la situation sur l’île». Reste à voir si ces manifestations, dont les portées sont pour le moment très limitées, vont s’étendre ou s’éteindre dans les jours qui viennent, et surtout si Joe Biden continuera à soutenir les manifestants, prenant par là même le risque de rendre tout dialogue avec le régime cubain impossible. Sur le dossier de l’immigration illégale, le président démocrate a démontré ces derniers mois qu’il partageait la même vision que celle de Donald Trump, il semblerait que cela soit aussi le cas sur le dossier cubain. Finalement, loin de ressembler à celui de Barack Obama dont il a été le vice-président durant huit ans, le début de mandat de Joe Biden se rapproche finalement beaucoup plus de celui de Donald Trump que l’on aurait pu le penser.