Le FBI, qui n’a pas vu venir quelque chose d’aussi énorme que la violation du Capitole de Washington, met en garde dans la perspective de l’investiture de Joe Biden, cérémonie prévue pour le 20 janvier, de la reproduction avant ce jour de la même action insurrectionnelle que celle du 6 janvier mais qui se déroulerait dans différentes villes des Etats-Unis. La capitale américaine étant placée sous un état de siège qui ne dit pas son nom, les radicaux d’entre les supporters du président sortant n’auraient d’autre choix en vue de rééditer l’exploit du 6 janvier que de prendre d’assaut autant de sièges du pouvoir législatif qu’ils pourraient à travers le pays. Chaque Etat ayant son propre Capitole, c’est une cinquantaine de prises d’assaut qui seraient ainsi programmées par l’extrême-droite, auxquelles il faudrait faire échec séparément d’ici le 20 janvier. Quand il y en aurait que quelques-unes qui seraient effectivement menées, dans le nombre desquelles moins encore qui donneraient lieu aux mêmes scènes insurrectionnelles que celles du 6 janvier à Washington, les Etats-Unis n’en auraient pas moins basculé dans des troubles internes dont il serait impossible de prévoir les conséquences.
De deux choses l’une : ou bien les craintes du FBI ne se réalisent pas, et les Etats-Unis seraient déjà en passe de surmonter la crise commencée il y a maintenant quatre ans, mais qui a éclaté à la surface au cours de la présidentielle du 3 novembre ; ou bien elles se confirment peu ou prou dans les prochaines heures, et dans ce cas, bien loin de se terminer, la crise ne fait au contraire que se corser tout en se généralisant. L’incertitude à cet égard est telle aujourd’hui qu’aucune de ces deux possibilités n’est à exclure. Pour ne pas être pris au dépourvu, c’est désormais heure par heure qu’il faut suivre les événements. Chacun d’eux est à prendre en considération, car chacun est susceptible de faire pencher la balance dans un sens plutôt que dans un autre. Il y a quelques heures seulement, la grande question qui se posait était de savoir si Donald Trump serait destitué par le recours au 25e amendement, ce qui suppose le concours du vice-président Mike Pence et des membres importants de l’administration sortante, ou si pour cela il faudrait enclencher une nouvelle procédure d’impeachment. On sait maintenant que la première possibilité est à éliminer, Pence s’y étant refusé. Or la deuxième ne lui est pas équivalente. Les démocrates n’ont pas le choix entre l’une et l’autre, tout en ayant une préférence pour la première. Celle-ci cessant d’être envisageable, c’est la deuxième, la procédure d’impeachment, qui s’en trouve mise en échec à son tour. De sorte que Trump s’en ira dans les règles, si l’on peut dire, non pour avoir été destitué mais parce que son mandat est arrivé à son terme. Pour la suite de la crise, ce n’est pas la même chose qu’il soit chassé du pouvoir, ne serait-ce que d’un jour avant la fin du temps prescrit, et quelle que soit la façon dont il l’a été, ou qu’il parte parce que ce temps est fini. Pour quelqu’un qui comme lui croit avoir un avenir politique, la différence est de taille. Si les démocrates ont tant voulu le destituer, ce n’est pas seulement pour l’humilier, ou pour lui rendre une partie de ce qu’il leur aura fait subir pendant ces quatre dernières années, mais pour lui faire quitter une bonne fois pour toutes la scène politique. Il semble bien que leur première tentative en ce sens ait déjà échoué.