55,30 % est le taux de réussite à l’examen du baccalauréat session 2019-2020, contre 54,56 % l’année dernière. Ce n’est pourtant pas un indicateur dont on pourrait s’enorgueillir ni le constat d’une meilleure performance d’évaluation d’une année scolaire déstabilisée par la propagation du coronavirus. Ce taux aurait été nettement plus faible si la moyenne minimale de réussite n’avait pas été descendue à 9/20 mais maintenue à 10/20. Un constat déploré et partagé par nombre d’observateurs, dont les syndicats du secteur.
Par: Lynda Naili
C’est ainsi que Boualem Amoura, président du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef), réagissant dans une vidéo postée hier sur son compte Facebook sur les résultats du baccalauréat, dira que «de prime abord, le Satef n’accorde pas d’importance aux chiffres annoncés». Des chiffres qu’il considérera «biaisés et ne reflètant nullement le vrai niveau du système éducatif algérien». Et d’estimer que «malgré la décision de rabaisser la moyenne de réussite à 9/20, nous n’avons pas fait de miracles car le taux de 55,30 % est insuffisant». Selon lui, «les élèves n’ont pas pu faire mieux car le vrai problème réside dans le système éducatif lui-même». «Aujourd’hui, poursuivra-t-il, nous constatons avec amertume que les bacheliers iront à l’université avec un savoir diminué parce qu’ils n’ont pas étudié le troisième trimestre où des cours très importants sont programmés». «L’année scolaire débutera le 4 novembre, comment fera-t-on pour récupérer ce troisième trimestre et terminer l’année scolaire ?», s’interrogera le président du Satef. Expliquant le classement en première place de la filière mathématiques, il dira que, d’une part, «il n’y pas un grand nombre de candidats en la matière» et, d’autre part, «les coefficients des matières de cette filière sont de loin plus importants que ceux des autres filières». Faisant part de la «déception» de son syndicat par des «décisions politiques prises au détriment du savoir», il rappellera que «le Satef avait proposé, dès le mois de mai, au ministère de l’Education, que l’on passe le baccalauréat avec une prise de considération de 25 à 30 % de la fiche d’évaluation scolaire de l’élève, ce qui aurait évité de recourir à la baisse de la moyenne de réussite». Enfin, relevant que son syndicat «depuis le siècle dernier milite pour une école publique de qualité accessible pour tous», il réitèrera son appel à «une refonte radicale du système éducatif» où les rythmes scolaires, les méthodes et méthodologies d’enseignement, les contenus des programmes seront réétudiés. «Nous devons arrêter de faire dans le bricolage», a-t-il martelé.
«Un taux aussi surprenant qu’inattendu»
Abondant dans ce sens, Nabil Ferguenis, syndicaliste et militant éducatif, considérera que «le taux de réussite au baccalauréat annoncé pour cette année scolaire, fortement impactée par la pandémie de Covid-19, ne reflète en rien le niveau réel des candidats qui ont été contraints à déserter pendant plus de huit mois les bancs de l’école». Qualifiant de «grandement surévalués» les résultats annoncés, le syndicaliste en déduira que «la décision de revoir à la baisse de la moyenne minimale de réussite est une preuve réelle des résultats catastrophiques constatés à l’issue des corrections». Lesquels résultats, dira-t-il, «indiquent en réalité le véritable niveau des candidats, conséquence de la pandémie qui a négativement impacté le processus pédagogique, notamment au plan psychologique». Dans ce sens, Nabil Ferguenis, soulignant le degré de perturbation du niveau de rendement pédagogique des élèves durant l’année scolaire précédente, ne manquera pas d’afficher son étonnement quant au taux de réussite annoncé. «Un taux aussi surprenant qu’inattendu», dira-t-il, «en raison des échos formulés ici et là à travers les centres de correction». «Et c’est d’ailleurs là, soulignera-t-il, ce qui justifie la décision des responsables du secteur de recourir à l’adoption du 9/20 comme moyenne de réussite». Une lecture que partagera également Meziane Meriane, président et coordinateur national du Snapest (Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique), qui estimera que «si la moyenne minimale de réussite était maintenue à 10/20, le pourcentage aurait été nettement inférieur à
50 %». Et de regretter, à ce propos, le fait que «les six mois de vide pédagogique qui ont marqué l’année scolaire n’aient pas été véritablement exploités pour une meilleure préparation des candidats». En outre, commentant le taux de réussite par filières, il dira que «si celles des mathématiques et des sciences exactes se sont placées en tête du podium, c’est le fait que le taux d’occupation des classes destinées à ces filières ne sont pas en surcharge», ce à quoi il ajoutera que «les meilleurs élèves en première année secondaire justifient un peu les résultats». Pour rappel, les résultats de l’examen du baccalauréat de la session 2019-2020 ont été annoncés par le ministère de l’Education nationale avant-hier soir qui a fait état d’une réussite de 55,30 % des candidats examinés. Selon les filières, celle des mathématiques arrive en tête avec un taux de réussite de 80,22 %, suivie des langues étrangères avec un taux de 67,78 %, la filière technique mathématique avec 58,48 %, sciences expérimentales avec 56,97 % puis la filière littéraire et philosophie avec un taux de 52,60 % et enfin gestion et économie avec 38,09 %.